Qu'est ce qu'il y avait avant Wonderland ? Qu'est ce qu'il y avait avant qu'elle entre dans cette illusion, ce simulacre de vie ? Elle ne se souvient plus très bien ou si peu. Elle tout bonnement oublier ou alors ces souvenirs qu'elle pensait avoir réussie à sortir de son esprit c'étaient échapper d'eux-mêmes pour glisser dans la rivière de sang. Et même le peu dont elle se souvenait elle voulait l'oublier, l'oublier à tout jamais.

Dans ses souvenirs qui s'accrochent tel des moules à son crâne, il y avait « elle », cette personne qu'elle avait appelée jadis Maman. D'elle en garde le souvenir d'une loque imbibé d'alcool allongé sur le canapé du salon quand elle n'obéissait pas au doigt et à l'oeil de celui dont elle a été enchaînée à vie, par la mairie et par l'église. Elle se souvient qu'elle avait été jolie il y a un temps, mais quand son visage lui revient en mémoire celui est toujours consteller de marques de coups et d'oeil au beurre noir.

Et il y avait « lui », l'homme qui voulait qu'elle l'appelle Papa. Mais pourquoi l'appeler ainsi quand aucun lien de sang, ni sentimental ne la retenait à ce sinistre individu. Que rien ne la retenait à cet homme qui battait elle et sa mère à toute heure du jour et de la nuit.

Et puis il y avait, « la cave ». Pourquoi « Il » l'avait enfermé là-dedans ? Elle ne se souvient plus... elle ne veut plus savoir. Combien de temps à-t-elle tenue le coup dans le noir et l'humidité avec comme nourriture juste de quoi vivre jusqu'au lendemain ? Combien de temps c'était déjà écoulé avant que le lapin arrive pour lui tenir compagnie ? Avant qu'elle réussisse à trouver, à croire à une porte de sortie dans une pierre aiguisé par ses soins et des bras fragiles qui s'entaillent si facilement. Elle ne se souvient plus.

Puis elle était arrivée ici, dans le royaume du non-sens et de la folie. Le pays de la mort et des illusions. Elle rejoignit le Mad Hatter et ses partisans. Leur thé est si délicieux. Elle se trouva mille et une activité : parler en rime, dire bonjour 7 personnes différentes dans la journée, collectionner les chaussettes, ouvrir les tiroirs des autres, surtout si ce tiroir est fermé à clé, faire tourner en bourrique les sujet si narcissiques de la si narcissique reine blanche. Et surtout, surtout retrouver à tout prit ce lapin blanc qu’il avait jadis tenu compagnie dans une cave sombre et humide. Car c’est lui qu’il a amené ici pas vrai ? Dans ce lieu qui n’existe pas, ces personnes qu’elle rencontre, croise et recroise… elles n’existent pas, non ? Car quand on est mort on cesse d’exister, non ? Alors à quoi sert de s’attacher à quelque chose qui n’existe pas ?

C’est pour cela que sans un sentiment de tristesse elle vit Wonderland s’écroulait après la mort du Sad Hatter. Elle vit, sans aucun regret, le pays sombrer dans un cauchemar sanglant et horrifique. Elle s’en fout. Ils sont morts, tous morts, Ce monde n’existe pas. Et puis elle est trop occupée à chercher son lapin. Tout en éludant cette question qui surgit quelques fois dans son cerveau irrémédiablement atteint par la folie ambiante : « et quand je le retrouve mon lapin, je fais quoi ? ».